Manuel Castells est un sociologue catalan et le Wall Street Journal l'appelle le premier philosophe du cyberespace. Ce professeur en Communication à Berkeley et professeur invité d'une quinzaine autres universités dans le monde. Manuel Castells a publié de nombreux livres, traduit en 20 langues, et il est dans l'Univers des Sciences de l'Information et de la Communication l'un des auteurs les plus cités. Moins connu en France... puisque la France a ses intellectuels "home-made"... alors qu'il a pourtant effectué son parcours universitaire en France et qu'il été professeur à l'EHESS. La revue Sciences Humaines lui a néanmoins consacré un article en 2000 dans le hors-série "Les nouveaux visages du capitalisme" ce qui est est le positionne plutôt dans le courant de la pensée critique.
Influencé par l'Ecole de Francfort et les travaux de Habermas, Il s'intéresse très tôt au « Net » et surtout à son influence sur l'exercice du pouvoir politique. Il est l'un des premiers à détécter la nouvelle forme d'organisation en réseau qui remplaçe progressivement l'ancienne organisation hiérarchique verticale comme modèle social dominant. Dans son nouveau livre "Communication Power" (ndlr : il n'est pas encore disponible sur Amazon, mais on y trouve "The media in the network Society" dont Manuel Castell est le coauteur avec Gustavo Cardoso) il explique le basculement historique du pouvoir. Il part du principe que le pouvoir est lié à la manière dont les gens pensent, à la manière de construire des images, à la manière de se comporter et à la manière de construire sa relation au monde. Or cela n'est pas qu'un processus individuel, mais un processus social et l'environnement communicationnel intervient forcement sur la façon de penser le monde. Pendant longtemps, le pouvoir a pu exercer une domination à travers la religion, les médias et par la même occasion imposer une vision du monde. Aujourd'hui, avec plus d'un milliard de connectés à Internet et le développement fulgurant des portables, les gens peuvent communiquer entre eux et utilisent les médias autrement.
Manuel Castells ne verse cependant pas dans l'angélisme : si les peuples bénéficient aujourd'hui d'un accès plus démocratique aux médias, cela ne veut pas forcément dire que l'essence de l'idée de démocratie progresse : l'internet ne favorise pas forcément la propagation des valeurs d'humanistes. Comme dit Manuel Castells les gens sont plus libres mais pas nécessairement plus "sympas"... même si certains sont pointés du doigt en flagrant délit.
Pour illustrer cette prise de pouvoir il prend d'ailleurs l'exemple du sénateur Allen qui a été filmé par le participant d'un meeting en train de tenir des propos racistes. Un "geek" a mis cette séquence immédiatement depuis son portable sur YouTube et le sénateur a ainsi eu la surprise de faire l'ouverture du journal télévisé. Cet incident qui date d'août 2006 lui a tout simplement fait perdre l'élection, l'espoir de se présenter aux élections présidentielles et aux Républicains la majorité au Sénat.
Je vous invite à retrouver son interview sur la BBC en podcast dans l'émission "A world of ideas" du 14 septembre 2008... mais bon trop d'information tue l'information ;-) je viens juste de prendre le temps de l'écouter.
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